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Mariage joyeux au cimentière

Petit clin d’œil à Tim Burton Ne croyez pas tout ce qu’on vous raconte ! La mort n’est pas si noire qu’on veut bien nous le laisser croire ! J’en ai eu la preuve hier avec ma grand-mère. D’ailleurs si vous-même, dans votre entourage, vous avez un vieux déprimé qui vous pompe l’air, je vous conseille vivement de lui faire faire une balade au cimetière ! Comme il devrait y passer un petit bout de temps, ça lui permettra de s’y habituer progressivement. Il comprendra aussi que l’endroit n' est pas si déprimant et qu' il peut même être très amusant. J’imagine votre étonnement... Et pourtant ! Pour que vous compreniez, le mieux, c’est que je vous raconte ce qui nous est arrivé : Toute la journée d’hier, le soleil avait tapé très fort. J’avais eu chaud, ma grand-mère et Jules César aussi ! Jules César, c’est mon chien. Pourquoi je l’ai appelé comme ça ? Honnêtement, je n’en sais trop rien. Et puis qu’importe ! Si ce nom ne vous plaît pas, vous avez parfaitement le droit de l’appeler autrement. De toute façon, de là où vous êtes, il ne vous entendra pas. Donc, pour en revenir à ma journée d’hier, comme nous avions eu trop chaud et que nous ne sommes pas des chameaux, j’ai proposé à tout ce petit monde d’aller prendre l’air au cimetière. Ma boule de poil a remué le derrière, quant à Mémé elle s’est juste réveillée pour me dire : « Drôle d’idée »... Je lui ai répondu : « Faut bien t’y habituer ! ». J’ai donc entrepris de la déplier, je l’ai aidée à s’habiller puis à s'enfoncer dans son fauteuil roulant. Et hop, en avant! Nous avions à peine fait cent mètres que déjà elle dormait ! J’ai commencé à stresser. Figurez-vous que quand elle ferme les yeux, par un mécanisme qui m’est totalement inconnu, sa bouche s’ouvre! Un jour, son dentier est même tombé et un pied qui passait par là, l’a carrément écrabouillé ! Et puis faut faire gaffe, un malheur est si vite arrivé... Imaginez un peu qu’elle avale un insecte avarié ? Bref, quand j’ai vu ça, ni une ni deux, j’ai retiré mon joli foulard et je lui ai noué autour de son visage tout fripé! Si vous l’aviez vue ! Elle ressemblait à un œuf de pâques légèrement fondu. Jules César, de son côté, ne s’occupait nullement de mémé. Lui s’amusait à pisser sur le coin des tombes qui l’inspiraient. De temps en temps, je m’arrêtais sur celles où il y avait des photos. Comme au concours de Miss France, je commentais : « Trop gros, trop grand, trop maigre, trop méchant. » Mais quand il y avait un visage charmant, j’imaginais une vie pleine d’amour et de tendresse. Des caresses, des ivresses et aussi quelques bonnes histoires de fesses. Je riais, tandis que ma grand-mère ronflait et que mon chien aboyait. Le soleil n’allait pas tarder à se coucher, j’étais sur le point de rentrer quand, soudain, Jules s’est mis à gratter la terre. Sans doute alléché par l’odeur d’un vieil os pourri. Comme un fou, il s’est mis à creuser un trou ! Si grand, si gigantesque, qu’on a pu tous y rentrer! Et là, en deux temps trois mouvements, nous avons dégringolé dedans ! Nous avons atterri quelque part, au centre de la terre, en dessous du cimetière. Il y avait un de ces vacarmes ! Figurez-vous que nous sommes tombés en plein milieu d’une fête, dans une fanfare de squelettes. L’un tapait sur des crânes, un autre soufflait dans un humérus. Il y en avait même un qui jouait de la harpe sur une série de côtes. Le bassiste, lui, s’était fait une guitare dans une hanche où il y avait enfoncé une sorte de manche à balai. Devant une telle créativité, je restais bouche-bée ! Mémé, qui s’était réveillée, m’annonça alors qu’elle avait envie de swinguer. J’étais sidérée. Fallait voir ses yeux ! Ils pétillaient ! Je n’ai pas eu le temps de bouger qu’elle se levait de son fauteuil roulant et qu’elle allait rejoindre le groupe de morts-vivants qui dansaient sur le coté! Le seul petit problème, c’est qu’ils n’étaient pas vraiment frais... Pour vous dire la vérité, ils puaient ! Heureusement, ma grand-mère a toujours une petite bouteille d’eau de Cologne coincée entre ses vieux nichons. Du coup, j’ai pu asperger les cornichons ! Pendant que je découvrais l’endroit, je laissais Mémé s’amuser. Au plafond, des guirlandes d’araignées étaient accrochées, tandis que sur les murs, des milliards de lucioles clignotaient. Jules César trônait victorieux sur une gigantesque montagne d’os à ronger et moi, j’observais d'étranges mariés qui arrivaient. A l’arrière d’un magnifique corbillard décapotable tout noir, ils saluaient la foule en délire qui leur jetait des cendres argentées. A l’avant, l’air sévère, un croque-mort pas tout à fait mort conduisait. D’ailleurs, c’est assez marrant, c’était le seul qui était vraiment flippant ! Les mariés, eux, étaient charmants. Monsieur avait logés entre ses côtes une multitude de chrysanthèmes; quant à Madame, elle était coiffée d’un magnifique fantôme d’un blanc éclatant ! Ils étaient superbes ! A l’arrière du véhicule, des chauves-souris, dans un balai incessant, formaient des mots d’amour en l’honneur des amants. La soirée, je dois dire, fut très animée. J’ai adoré... Bon, c’est vrai que j’ai eu un peu de mal avec le buffet. Entre les toasts d’asticots et le jus de cervelle, j’avoue avoir eu, de temps en temps, un peu de mal à avaler. Mais je ne vous ai pas raconté ce qui est arrivé à ma mémé... Figurez-vous qu’elle a tellement dansé que son cœur s’est arrêté. Moi sur le coup, j’étais paniquée. J’ai hurlé : « Elle est en train de crever ! » Le marié m’a rétorqué: « Fous lui la paix. » C’est alors que ma Mémé s’est levée, m’a embrassée puis, comme libérée, s’est déshabillée en laissant tomber sa peau. Il ne lui restait plus que les os ! Jules césar a foncé sur elle. Sur le coup, j’ai cru qu’il allait la bouffer. Mais non il s’est contenté de la lécher affectueusement. Et là, je dois dire que j’ai revu mon jugement. Non, la mort n’était pas aussi noire qu’on avait bien voulu me le laisser croire. Alors, quand le soleil s’est levé et que tout le monde s’est endormi, Jules césar et moi, nous sommes repartis sans faire de bruit...


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